Jeanne Victoire Henriette de Navailles

Portrait par Adélaïde Labille-Guiard
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Jeanne de Navailles, Baronne de Mirepeix et d'Assat, Vicomtesse de Saint-Martin d'Arberoue.
Née le 5 mai 1770 à Pau (64) . Décédée le 7 juin 1818 et inhumée au Père Lachaise à Paris (Division 8 ; Section 1).
Elle a épousé le 1er février 1785 Armand Désiré de Vignerot dont elle eut un fils en 1788.
En 1792, après l'émigration de son mari à Londres, elle obtint le divorce afin de protéger la propriété de ses biens propres et alla vivre à Pau avec son fils Louis-Armand qui mourut d'une grave maladie en 1796 sans avoir revu son père.
En 1793 elle fut enfermée à la prison des Carmes en compagnie de Mesdames Tallien et Beauharnais, comme suspectes. Voir ci-dessous le récit de cette incarcération par Alphonse de Lamartine :

Illustration d'Eustache Lorsay (1822-1871), peintre
et de Cosson Smeeton, graveur

Aux Carmes, un cachot étroit et sombre, dans lequel on descendait par deux marches et qui ouvrait, par une lucarne grillée, sur le jardin de l'ancien monastère, renfermait trois femmes jetées de la plus haute fortune dans la même prison. Jamais la sculpture n'avait réuni un pareil groupe de visages, des charmes, des formes plus propres à attendrir les bourreaux. L'une était Mme d'Aiguillon, femme d'un nom illustre, le sang de sa famille fumait encore sur l'échafaud ; l'autre, Joséphine Tascher, veuve du général Beauharnais, récemment immolé pour avoir été malheureux à l'armée du Rhin : la dernière et la plus belle de toutes était cette jeune Thérésa Cabarrus, aimée de Tallien, coupable d'avoir amolli le républicanisme du représentant à Bordeaux et d'avoir soustrait tant de victumes à la proscription. Le comité de salut public venait de l'arracher à la protection du proconsul, sans pitié pour ses murmures, et de la jeter dans les cachots, toute suspecte encore de son influence sur Tallien. Une tendre amitié unissait deux de ces femmes entre elles, bien qu'elles se fussent disputé souvent l'admiration publique et celle des chefs de l'armée de la Convention. L'une était prédestinée au trône, où l'amour du jeune Bonaparte devait l'élever ; l'autre était prédestinée à renverser la République en inspirant à Tallien le courage d'attaquer les comité dans la personne de Robespierre.
Un seul matelas étendu sur le pavé, dans une niche au fond du cachot, servait de couche aux trois captives. Elles s'y consumaient de souvenirs, d'impatience et de soif de vivre ; elles écrivaient avec la pointe de leurs ciseaux, avec les dents de leurs peignes, sur le plâtre de leurs cloisons, des chiffres, des initiales, des noms regrettés ou implorés, des aspirations amères à la liberté perdue. Ici : "Liberté, quand cesseras-tu d'être un vain mot ?" Ailleurs : "Voilà aujourd'hui 47 jours que nous sommes enfermées." Plus loin : "On nous dit que nous sortirons demain." Sur une autre face : "Vain espoir !" Un peu plus bas trois signatures réunies :"Citoyenne Tallien, citoyenne Beauharnais, citoyenne d'Aiguillon."
Lamartine, Histoire des Girondins, Livre LVII, chapître III, pages 384 et 388

Une fois libérée elle tenta de faire radier son mari de la liste des émigrés et aussi de sauvegarder leur propriété de Rueil.
Le 25 février 1800, Talleyrand, devenu ministre de Bonaparte, l'informa qu'il avait obtenu la radiation de son mari.
Après le décès brutal de son mari, le 17 mai 1800, à Hambourg, elle épousa le député Louis de Girardin le 12 janvier 1801, dont elle eut trois enfants. nés en 1800, 1801 et 1811...
Elle fut dame d'honneur de Désirée Clary, l'épouse de Joseph Bonaparte, roi de Naples, puis d'Espagne.

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Sa tombe au Père lachaise avec l'inscription suivante :

A la mémoire de Jeanne Henriette Victoire de Navailles, comtesse Louis de Girardin, née à Pau Basses Pyrénées le 5 mai 1770, décédée le 7 juin 1818. Sa mort fit le malheur de ses enfants et de ses amis. Si les vertus, les grâces, l'esprit et la beauté étaient des titres à l'immortalité, elle serait encore sur la terre l'image de la divinité.

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