Aiguillon pendant les guerres de religion
(Page mise à jour le 21/11/2022)

Les guerres de religion furent à Aiguillon, comme partout en France, une période de troubles car ses habitants et leur baron Honorat de Savoie étaient catholiques alors que beaucoup de villes voisines, Agen, Clairac, Tonneins, Marmande s'étaient ralliées à la Réforme. Pendant environ 40 ans, ce fut une suite de revirements, les villes passant alternativement d'un clan à l'autre et vice versa, le tout sur fond de tueries, pendaisons, viols...

Honorat de Savoie

Blaise de Monluc

En 1562, Aiguillon résista à une attaque de nuit par les huguenots. En juillet, Monluc qui tenait son pouvoir de Catherine de Médicis pourchassait les Réformés dans le sud-ouest sans faire de quartier (400 morts du côté de Nérac, 700 à Monségur) ; il s'empara de Duras, Clairac qu'il imposa de 30 000 livres, de Tonneins et occupa Aiguillon, Port-Sainte-Marie et reprit Agen. Dans les deux camps on tuait et pillait, des petits enfants furent rôtis et on vit des scènes de cannibalisme.
En 1565, Catherine de Médicis et le jeune roi âgé de quatorze ans, Charles IX, ainsi que toute leur cour (le jeune Henri de Navarre âgé de 12 ans, futur Henri IV, en faisait partie ainsi que les autres enfants de la reine-mère : Henri duc d'Anjou, François duc d'Alençon et leur soeur Marguerite, future épouse d'Henri de Navarre), firent pendant plus de deux ans un long périple à travers la France. Le mardi 27 mars, venant de Port-Sainte-Marie par bateau ils entrèrent à Aiguillon où ils couchèrent et dînèrent le lendemain 28 avant de s'embarquer pour Marmande et Bordeaux.

Henri de Navarre jeune
par Dumonstier

Catherine de Médicis
atelier de François Clouet

Marguerite de France
future reine de Navarre

En 1567, le 10 novembre, Honorat de Savoie, baron d'Aiguillon, participa à la bataille de Saint-Denis où les protestants du prince de Condé et de l'amiral Coligny furent battus.
1569, offensive générale des calvinistes dans la région. Le 28 novembre, l'armée protestante des princes [ainsi nommée parce qu'y participaient Henri de Bourbon prince de Navarre, futur Henri IV et Henri de Bourbon prince de Condé son cousin] envahit l'Agenais ; elle prit Aiguillon, que lui livra Barthélémy Malvin de Montazet contre rançon de 8000 livres évitant ainsi la destruction de sa ville.
Le lendemain ils occupèrent le Port-Sainte-Marie et construisirent un pont de bateaux pour se mettre en contact avec l'armée de Montgoméry qui arrivait du Béarn où il venait de libérer Jeanne d'Albret, assiégée dans Navarrenx, et de battre le vicomte Terride, chef des catholiques, à Orthez ; Monheurt était occupé et Coligny campait entre Aiguillon et Villeneuve.
Les catholiques voulaient détruire le pont de bateaux et pour cela ils détachèrent à Agen un moulin à eau chargé de grosses pierres et l'abandonnèrent au courant de Garonne en crue, espérant que ce bélier flottant serait efficace. Ce fut le cas, mais le pont fut rétabli et en décembre les deux armées protestantes se joignirent (12 à15000 hommes) avant de gagner le Languedoc, et pour éviter Monluc, elles contournèrent Agen par le nord.
Aiguillon fut ainsi libéré.
Honorat de Savoie, fut nommé lieutenant général du roi en Guyenne à la place de Monluc fin 1570, maréchal de France en 1571 et amiral de France après la mort de Coligny à la Saint-Barthélémy.
1572-1573. Honorat de Savoie, avec 8000 hommes de pied et 2000 chevaux reprit des places fortes aux huguenots de Gascogne mais comme ses soldats vivaient du pillage, les paysans s'ameutèrent contre eux.
1575. Les protestants prirent le château de Madaillan appartenant à Honorat de Savoie ; Monluc fut incapable de le reprendre malgré son artillerie ; accablé d'infirmités, il se retira définitivement dans son château d'Estillac près d'Agen. Sa charge de lieutenant en Guyenne revint à Honorat de Savoie.
1577. Un édit de pacification ramèna le calme. Le 25 mai 1577 Henri de Navarre fit un séjour à Aiguillon qui était à cette époque aux mains des protestants.
1580. Reprise des hostilités : le 21 août, le capitaine Du Bosc, aidé de M. Ussac (1), gouverneur de la Reolle, à la faveur de la nuit, s'empara de la ville d'Aiguillon et de son château, au profit des catholiques.
1586. Charles de Lorraine, duc de Mayenne (le gendre d'Honorat de Savoie) venant de la Charente par Villeneuve, vint à Aiguillon (les consuls distribuèrent dix tonneaux de vin aux ligueurs pour prévenir les pillages) et s'empara de Tonneins, Damazan, Le Mas et Meilhan. L
e maréchal de Matignon échoua à capturer Henri de Navarre.
1587. Turenne prit le fort de Nicole pour les protestants.

Charles de Lorraine



Ses armoiries

Turenne

1589. Après l'élimination du duc de Guise, Henri III et Henri de Navarre s'allièrent. Il s'ensuit une période trouble, les villes de la région faisant allégence tantôt aux ligueurs, tantôt à Henri IV.

Henri de Lorraine

Henri III

1596. Charles de Lorraine (Mayenne) se soumit à Henri IV qui créa pour son fils Henri de Lorraine le duché pairie d'Aiguillon.

1598. En avril, Henri IV promulga l'Edit de Nantes, mettant fin aux guerres de Religion.

1621. Devant l'agitation renaissante des protestants, Louis XIII descendit dans le midi à la tête de son armée. Le 7 juillet, Henri de Lorraine reprit Nérac qui était aux protestants.
Il rejoignit le Roi au siège de Montauban où il fut tué d'une balle dans l'oeil ; son corps fut ramené à Aiguillon pour être enterré dans l'église des Carmes.
N'ayant pu prendre Montauban, l'armée royale vint assiéger Monheurt sur la rive gauche de la Garonne, du 29 novembre au 13 décembre. Louis XIII occupa alors le château de Bourbon dominant la vallée, sur l'autre rive. Selon le Général Albert de Peyrelongue, fin connaisseur de l'histoire locale et de l'artillerie, il pouvait bombarder Monheurt, distant de 1500 mètres, en tirant des boulets de 36 livres ayant une portée comprise entre 1600 et 3700 mètres.

Boulet de 36 livres
(15,3 kg et 15,5 cm de diamètre)
trouvé lors d'un terrassement
dans les environs d'Aiguillon

Monheurt fut pris, pillé et brûlé, ses derniers survivants massacrés.
Luynes, malade de la fièvre pourpre, succomba non loin de là, le 15 décembre, au château de Longuetille, abandonné par le Roi.
Aiguillon était resté fidèle au roi.

(1) Ussac, zélé protestant, lassé des railleries du roi de Navarre et de Turenne au sujet de son idylle avec la belle Anne d'Aquaviva alors qu'il était vieux et balafré au visage, finit par se faire catholique et livra La Réole à Catherine de Médicis, puis Aiguillon.

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