Clément Maurice, un pionnier du cinéma
né à Aiguillon
Publié le 15/07/2021 dans Le Petit
Bleu d'Agen
La télévision a récemment diffusé le magnifique film
"Edmond", tiré de la pièce éponyme (et à succès !) d'Alexis Michalik,
jouée pour la première fois en 2016, à Paris, au Théâtre du Palais Royal.
Le générique final, particulièrement émouvant, s'y accompagne des photos
des grands artistes qui ont interprété le rôle : le Toulousain Daniel
Sorano, Jean Piat, Jacques Weber, Michel Vuillermoz, Jean Marais, Gérard
Depardieu…
Mais sont aussi évoqués les films qu'inspira la célèbre pièce d'Edmond
Rostand, notamment le premier, tourné en 1900, soit trois ans seulement
après la création de la pièce, avec mention de son réalisateur, Clément
Maurice. Un nom qui ne dit plus grand-chose aux cinéphiles, même lot-et-garonnais.
Et pourtant…
D'abord pionnier de la photographie
En effet, rares sont ceux qui, en Lot-et-Garonne ou ailleurs, ont entendu
parler de Clément Maurice Gratioulet né à Aiguillon, le 22 mars 1853,
d'une vieille famille terrienne et locale. Très tôt, le jeune homme
s'oriente vers la photographie, alors balbutiante, qui fut sa passion
et son premier métier. C'est ainsi qu'il quitta la cité ducale pour
"monter" à Paris, où il exerça d'abord la profession de photographe
pour l'édition "Paris en plein air", réalisant de nombreuses photos
(toujours précieusement conservées) sur le pittoresque Paris de l'époque.
Il installe ensuite un atelier de photographie en plein cœur de la capitale,
boulevard des Italiens. Sa notoriété naissante l'incite à se choisir
un patronyme qui fleure moins la province, et il se fait désormais appeler
Clément Maurice, qui devient son nom d'artiste. Il est remarqué par
les frères Lumière dont on connaît l'importance dans l'histoire du cinéma.
Une collaboration va s'ensuivre, permettant à Clément Maurice de se
faire un nom dans le tout nouveau septième art.
Passionné de cinéma
Il devient tour à tour producteur, réalisateur, scénariste, chef opérateur.
Au tout début des années 1900, on lui doit une dizaine de films, tantôt
issus d'un scénario original, tantôt adaptés d'œuvres célèbres de la
littérature ("Cyrano de Bergerac", "Madame-sans-Gêne", "Hamlet", "Roméo
et Juliette"). Son dernier film, tourné en 1911, s'intitule "L'inutile
sacrifice", comme une prémonition intuitive des tragiques événements
qui allaient débuter trois ans plus tard…
De 1898 à 1906, il filme les opérations chirurgicales du Dr Doyen, qui
a notamment séparé avec succès deux sœurs siamoises. C'est que Clément
Maurice est aussi passionné de science : à l'instar de Ducos du Hauron,
il fut également un inventeur de génie, développant un système pionnier
du cinéma sonore qui fut présenté à l'Exposition universelle de 1900
et lui permit de collaborer avec les célèbres Laboratoires Eclair. Après
la guerre de 14-18, il se retira dans le Var, à Sanary-sur-Mer, où il
mourut en 1933. Ses deux fils ont laissé eux-mêmes un nom dans l'histoire
du cinéma. L'aîné, Léopold Gratioulet (1880-1972) fonda la société Cinéma-Tirage
; le cadet Maurice Gratioulet (1883-1964) fut directeur technique à
la G.M. Films, et aussi directeur des laboratoires Eclair.
Alain Paraillous
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