L'énigme du lieu de naissance de Théophile de Viau (1590-1626) accueil du site aiguillon47


Malgré la Mort et se outrages
Le fameux Theophile est icy tout entier
Son visage et son air sont peints en ce papier
Et son esprit en ses ouvrages


THEOPHILE de Viaud
poete françois né à Boussères près
d'Eguillon il mourut à Paris dans
l'hôtel de Montmorency l'an 1626

 

Les œuvres de Théophile de Viau connurent un si vif succès au XVIIème siècle qu’elles nécessitèrent 93 éditions successives pour satisfaire la demande des lecteurs. Bien plus que Malherbe, aujourd’hui plus connu.

Où est donc né Théophile de Viau, ce poète que ses contemporains appelaient Théophile et qu’ils considéraient comme
"le premier prince des poètes" ?

---Tous les Clairacais vous le diront : "Il est né en 1590 chez nous, à Clairac-en-Agenais, au lieu-dit Boussères comme l’affirment tous les livres. Théophile l’a dit lui-même dans un poème :
Clérac pour une fois que vous m’avez faict naistre Hélas ! Combien de fois me faites-vous mourir !
Sonnet

—Pas du tout, protestent les Portais ; c’est à Boussères (différent géographiquement du précédent) qu’il est né, dans la commune de Port-Sainte-Marie. Son modeste manoir avec son pigeonnier carré se trouve toujours à quelques mètres de l’église aujourd’hui en ruines de Saint-Pierre-Saint-Marcellin. D’ailleurs les Archives du Lot-et-Garonne possèdent une copie d’une gravure représentant Théophile, avec l’inscription : Théophile de Viaud, poète français né à Boussères près d’Éguillon. Voir la carte des environs d'Aiguillon

—Vous n’y êtes pas, disait le Général Albert de Peyrelongue, féru d'histoire, même locale : Il est né dans une propriété située sur la gauche de la route d’Aiguillon à Saint-Léger, non loin du pont. Ce lieu porte encore le nom de Viau et on peut le repèrer sur les cartes. Voici d’ailleurs comment il présentait sa petite patrie à une dame de la Cour qu' il invitait chez lui :
  Là tu verras un fonds où le paysan moissonne
Mes petits revenus sur les bords de Garonne,
Le fleuve de Garonne où de petits ruisseaux
Au travers de mes prés vont apporter leurs eaux,
Où des saules épais leurs rameaux verts abaissent
Pleins d’ombres et de fraîcheur sur mes troupeaux qui paissent.
Elégie

Alors Clérac ? Boussères ? Terre de Viau près du Port-de Pascau ? La plupart des historiens locaux penchent pour Boussères, mais après tout, chacun peut rêver...

Sans doute a-t-il vécu aux trois endroits. Ce qui est sûr, c’est qu’il était attaché à cette région, puisqu’il a écrit dans une lettre à son frère:

  ...quelque cruel complot
Qui de la Garonne où du Lot
Veuille éloigner ma sépulture
Je ne dois point en autres lieux
Rendre mon corps à la Nature
Ni résigner mon âme à Dieu.
Poème

Cela ne se passa pas ainsi : peu après sa sortie de prison, il mourut et fut inhumé dans l'église Saint-Nicolas-des-Champs, 254 rue Saint-Martin à Paris et en 1804 ses ossements furent portés aux Catacombes...

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Théophile de Viau, un poète insoumis né près d'Aiguillon
Publié le 14/08/2021 dans Le Petit Bleu d'Agen

Érudits et biographes se sont longtemps disputés sur le lieu de naissance du poète Théophile de Viau. Qu'il ait vu le jour en Agenais, quelque part du côté du confluent du Lot et de la Garonne, nul ne l'a jamais mis en doute. D'autant plus que plusieurs de ses textes mentionnent le toponyme de Boussères, propriété ancestrale de la famille huguenote des Viau. Sous un portrait du poète exécuté peu de temps après sa mort par Etienne Jehandier Desroches, on peut d'ailleurs lire : "Théophile de Viau, poète français né à Boussères, près d'Eguillon. Il mourut à Paris dans l'hôtel de Montmorency l'an 1626". L'ennui, c'est que "près d'Aiguillon", il y a deux Boussères : l'un situé sur la route de Port-Sainte-Marie, l'autre sur la route de Clairac. Le premier sur les rives du Lot, le second sur les rives de la Garonne. Pour ne rien arranger, dans un poème composé à la fin de sa vie, le poète écrit :

"Quelque cruel complot, Qui de Garonne ou du Lot, veuille éloigner ma sépulture, je ne dois point en autre lieu, rendre mon corps à la nature." Qui plus est, dans un douloureux sonnet dédié à Clairac, la protestante, effroyablement saccagée par les troupes de Louis XIII, le poète se lamente ainsi : "Clairac, pour une fois que vous m'avez fait naître. Hélas, combien de fois me faites-vous mourir !"

D'aucuns en ont déduit qu'en dépit de la mention écrite sous son portrait, Théophile de Viau était né, sinon à Clairac, du moins au Boussères le plus proche de Clairac, entre Sainte-Radegonde et Bourran. Ceci d'autant plus aisément que ce lieu-dit présente un corps d'habitat ancien en appareillage de pierre taillée, une toiture élevée et pentue, à tuiles plates, vestiges de quelque demeure de hobereau. Puis, comme cela se fait souvent en histoire, chacun répétant à l'envi ce qui a été écrit une fois, les biographies officielles de Théophile de Viau ont opté pour Clairac.

Une mise au point définitive

La très sérieuse et très fiable bible qu'est le mythique Lagarde et Michard, pourtant plus portée sur les classiques bien en cour que sur les dissidents baroques, ne lui consacre pas moins de trois pages, et d'emblée, sans état d'âme, le fait naître à Clairac : "Né à Clairac-en-Agenais, fils d'un avocat huguenot" etc. C'est l'universitaire bordelais Claude-Gilbert Dubois qui a définitivement tordu le cou à la localisation du Boussères situé près de Clairac. Point n'était pourtant besoin d'être grand clerc, il suffisait de lire l'œuvre de Théophile avec un peu d'attention. Dans le plaidoyer qu'il rédige du fond de son cachot où un terrible Jésuite, le père Garasse, l'a fait enfermer sous la double accusation d'hérétique et de sodomite, Théophile écrit : "Notre demeure se trouve au bord de la Garonne. Elle dresse, au-dessus de toutes les petites maisons du voisinage, une humble tourelle qui date de mes ancêtres […]. Le domaine héréditaire que j'habite n'est qu'à une demi-lieue du Port, que l'on appelle Port-Sainte-Marie".

Alain Paraillous

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Un intéressant blog qui parle de Théophile de Viau ICI

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