Les croix à Aiguillon

Zoom et vue de l'escalier

A l'extrémité Nord du Cours Alsace-Lorraine, en haut de l'escalier menant à la rue Gambetta, est érigée une croix de la Passion, en fer, fabriquée à Bordeaux, avec les attributs de la Passion dorés (Survolez l'image et cliquez pour zoomer et obtenir la vue depuis le bas de l'escalier rue Gambetta).
Elle fut installée le 7 juin 1820, le 5ème dimanche après Pâques, puis redorée à l'occasion de diverses Missions en 1836, 1875 et 1890.

 

Dans le quartier du Muneau, au carrefour de la rue Victor Hugo, de l'Avenue du 8 mai 1945 et de la rue Bernard Palissy se dresse une très ancienne petite croix de pierre posée sur un haut piédestal, et selon l'abbé Alis, elle existait à l'entrée Sud d'Aiguillon "de temps immémorial".
En 1834, ayant été renversée, elle fut restaurée avec l'argent recueilli par une quête auprès des fidèles, puis bénite par M. Lapeyrière, curé d'Aiguillon le 5 mai au passage de la procession des Rogations(*).

(*) Le mot « rogation » vient du latin rogare, qui signifie « demander ».
Les jours de Rogations sont les 3 jours qui précèdent la fête de l'Ascension.
Pendant ces journées, des processions et des prières sont destinées à favoriser la prospérité des futures moissons.
Elles ont pour origine les anciens rituels printaniers de fécondité adressés aux divinités du feu et de la fertilité. Dans la Rome Antique, les Robigalia sont une fête religieuse destinée à favoriser les récoltes. Créée selon la légende, par le roi Numa, en 704 av. J.-C. pour conjurer, le septième jour avant les calendes [1er jour du mois] de mai, les épidémies de (rouille, maladies cryptogamiques affectant les céréales).


La croix du Pech de Berre

Elle a été érigée à l'initiative des prêtres de cinq paroisses - Saint Félix d'Aiguillon, Saint-Côme, Lagarigue, Sainte-Radegonde (commune d'Aiguillon) et de Nicole- conformément au projet de Boullet de Marmande, sur le terrain situé au Pech de Bère, mis à disposition par M. Paul Amblard, châtelain de Lafon. La croix métallique sortie des ateliers Chanlou de Bordeaux mesure 18 m de hauteur au dessus d'un piédestal de 6 m. de hauteur et de largeur. Elle fut inaugurée en présence de Mgr Coeuret-Varin, évêque d'Agen, le lundi de Pâques de 1897 (19 avril). Avec une hauteur de 21 m au dessus du sol elle domine la plaine de Garonne et le confluent du Lot et de la Garonne ; elle faisait le pendant de celle de Buzet et devint la plus haute de France à la fin du XIX° siècle, dépassant celles de Verdelais, de Brive, du Nivolet (Chambery) considérées alors comme les plus hautes. Elle porte un christ d'une hauteur de trois mètres de haut et de large, fondu dans l'usine Gasneau de Tussey près Vaucouleurs (Meuse). Le simple chemin qui permettait d' accéder au Pech, transformé en " chemin de croix " avec ses 14 stations ayant chacune une croix de bois a été remplacée par une route.

Texte extrait du Dictionnaire de l'Agenais et de Lot-et-Garonne -- Photos Studio Christian à Aiguillon

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Article de Sud-Ouest du Dimanche 16 mai 2021

Sur la commune de Nicole, la croix monumentale du Pech-de-Berre domine le confluent du Lot et de la Garonne.

Le saviez-vous ? Haute de 18 mètres, cette croix métallique, vieille de 124 ans, est l'une des plus gigantesques d'Europe

Le site du Pech de Berre, est un des lieux phares du Lot-et-Garonne. Ce promontoire naturel domine en effet les deux vastes plaines dont les cours d'eau ont donné son nom au département. En cas de crue importante comme il s'en est vu récemment encore, le spectacle de l'inondation à perte de vue a de quoi fasciner. Mais vu d'en bas, le site impressionne aussi, tant il ressemble à une immense forteresse qui s'aperçoit à plusieurs lieues à la ronde.

Un site gaulois
Par sa configuration, le site du Pech-de-Berre constitue d'ailleurs une forteresse naturelle. Son toponyme pourrait être d'origine gauloise, le mot " berre " (que l'on orthographie " bère ", ou " ber " ou même " ver ", car le b et le v se prononcent de façon assez semblable, surtout dans nos régions) serait le même que l'on trouve dans le nom de Vercingétorix. D'après les linguistes, le mot " Ver " représentait un titre militaire, comme " général ", et désignait une personnalité importante. Ce " pech " (terme qui désigne un promontoire) fut donc probablement occupé par un " Ver " (ou " Ber ") avec sa garnison au tout début de notre ère.
A la suite de fouilles effectuées vers 1980, l'archéologue Alain Dautant a pu écrire : " Le Pech-de-Berre ne semble pas avoir été un oppidum, mais un rempart d'une d'une dizaine de mètres de large et d'une hauteur de quatre mètres a été édifié sur toute la largeur du plateau. Son cœur est constitué de terre cuite tandis que sa masse est formée de terre et de nombreuses pierres calcaires grises. Il semble que des habitations se soient appuyées sur son flanc du côté intérieur du camp. "
Plus tard, au Moyen Age, et sans doute dès la chute de l'empire romain, quand des hordes barbares, déboulant par le fleuve ou la rivière, se livraient au pillage et aux pires exactions, les populations riveraines montèrent se réfugier sur ces hauteurs.
Un important habitat troglodytique était encore visible ici au début du XXè siècle, comme le montrent d'anciennes cartes postales. Quelques abris sous roche et même une chapelle monolithique, creusée dans le roc, peuvent encore être visités par les téméraires qui ne craignent ni les ronces ni les sentiers effondrés. Au XVIIIè siècle, un ermite fut l'ultime occupant de ces lieux sauvages. Ce fou de Dieu descendait régulièrement à Aiguillon, la cité ducale toute proche, haranguant les passants sur la place publique, prédisant aux Loths de la cité ducale le sort de Sodome et Gomorrhe s'ils ne corrigeaient pas les légèretés de leur existence.

Une croix très emblématique
Ce passé religieux, allié à la hauteur du promontoire, fit naître l'idée, à la fin du XIXè siècle, d'ériger au sommet du " pech " un calvaire monumental qui se verrait à des lieues à la ronde.
A cette époque, la France catholique opère un systématique travail de reconquête. Sapée par les ricanements sarcastiques des philosophes des Lumières, persécutée pendant la période révolutionnaire, régulièrement mise à mal lors des convulsions qui secouent le société en 1830, puis en 1848, et encore lors de la Commune en 1871, l'Église résiste, riposte, et s'impose dans le paysage : construction de nombreux édifices religieux (notamment sous l'impulsion du cardinal Donnet, archevêque de Bordeaux), croix de mission, croix de carrefour, multiples statues de la Vierge, etc. Le site du Pech-de Berre ne pouvait que tenter la hiérarchie catholique. C'est d'ailleurs l'évêque d'Agen, en inaugurant une statue de Notre-Dame des Champs sur une colline surplombant Buzet, qui suggéra l'idée de cette construction monumentale.
Nous sommes alors à quelques trois décennies de l'érection de la Tour Eiffel, dont l'audace architecturale stupéfia le monde. La hauteur, le gigantisme de la Dame de Fer dépassaient tout ce qu'on avait pu construire jusque-là, y compris les cathédrales qui détenaient pourtant les records de hauteurs de tout ce que l'homme était en mesure d'édifier. Seul le fer, plutôt que la pierre ou le bois putrescible, pouvait être en mesure de dresser une croix aux dimensions hors normes. La croix du Pech de Berre serait donc métallique, comme la Tour Eiffel. Et elle mesurerait 18 mètres de hauteur. Pourquoi ce chiffre, et non pas 20, qui eût constitué un chiffre rond ? Eh bien tout simplement parce que les pièces sorties des usines sidérurgiques mesurent 6 mètres, ce qui est encore la norme aujourd'hui. La croix serait donc formée d'un assemblage de trois pièces en fer profilé.
Elle fut commandée par la paroisse aux ateliers Chalou, de Bordeaux et dotée d'un Christ de fonte réalisé par la fonderie Gasneau, en Moselle.

Une inauguration mémorable
L'inauguration eut lieu en 1897. En grande pompe. Un opuscule, publié par le l'abbé Thézan, alors curé d'Aiguillon, témoigne de la splendeur des festivités qui marquèrent durablement les mémoires. Les journaux, non seulement la presse catholique, mais aussi " le Journal de Lot-et Garonne ", principale publication quotidienne du département, firent un large écho, non seulement à la cérémonie, mais également à l'audace de la construction.

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Aujourd'hui encore le monument a de quoi impressionner, et figure d'ailleurs parmi les attraits touristiques de la région (grâce aussi, il est vrai, à son site exceptionnel . De fait, avec ses 18 mètres de haut, hissée sur un piédestal de pierres, la croix du Pech de Berre peut figurer sans complexe dans un livre des records, rares étant les édifices similaires, en Europe, qui ont l'audace de la surpasser.

Alain PARAILLOUS

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Dépose de la croix (3 tonnes), le 31 mai 2021, pour des travaux de rénovation(Photo Sud-Ouest)

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